ObjectifsRéponses apportées
Développer un patrimoine immobilier Ne pas augmenter les impositions IR/IFIAcquérir la nue-propriété d’un bien immobilier permet : de capitaliser sans imposition d’obtenir une rémunération directe (= capitalisation) et indirecte (= gain IFI)

Cette stratégie s’adresse aux particuliers, détenteurs d’un capital (ou d’une capacité d’épargne importante), qui souhaitent développer leur patrimoine, sans imposition supplémentaire.

1. Avantages – Inconvénients

1.1. D’un point de vue économique et juridique

AvantagesInconvénients
Aucun souci de gestion locative, l’usufruitier dispose librement le logementLe nu-propriétaire ne dispose pas immédiatement de la jouissance du bien et ne perçoit pas les revenus
Capitalisation sans imposition  (=gain à terme équivalent à la valeur de l’usufruit), sous réserve de la revalorisation du bien.Placement de long terme (10/15 ans minimum)
Les charges d’entretien sont supportées par l’usufruitier (C. civ. art. 605 et 606)Le nu-propriétaire doit en principe supporter les charges de grosses réparations du bien (C. civ. art. 605 et 606)
Diversification du patrimoineLiquidité quasi-inexistante pendant le démembrement de propriété
Obtention de revenus réguliers à l’extinction de l’usufruit sous forme de loyers (revenus fonciers)Aucune garantie en capital, ni en rendement

1.2. D’un point de vue fiscal

AvantagesInconvénients
 Valeur de la nue-propriété non prise en compte dans l’assiette taxable de l’IFI L’emprunt éventuellement contracté ne peut pas être inscrit au passif de l’IFI
Déduction dans la catégorie des revenus fonciers, des charges relatives à l’immeuble à condition que l’usufruitier soit imposé aux revenus fonciers ou qu’il ait la qualité de bailleur socialSi l’usufruitier ne loue pas le bien ou s’il le loue sans être soumis aux revenus fonciers (location meublée par exemple), les charges relatives à l’immeuble, que le nu-propriétaire supporte, ne peuvent être déduites dans la catégorie des revenus fonciers
Pas d’imposition supplémentaire sur les revenus (ni impôt, ni prélèvements sociaux) car aucuns revenus perçus 
Droits d’enregistrement réduits puisqu’ils sont calculés sur la valeur de la nue-propriété 

2. Principes

2.1. C’est quoi la nue-propriété ?

L’acquisition d’un bien immobilier se réalise en général en pleine propriété. Mais il est possible de n’acquérir que la nue-propriété. Une autre personne physique ou morale achète l’usufruit pour une durée temporaire. Il s’agit d’immobilier d’habitation (généralement logements à loyer modéré) ou d’entreprise (bureaux, commerces). 

Rappel

Le droit de propriété peut être divisé en 2 droits distincts (on parle alors de démembrement de propriété) : 

  • la nue-propriété qui donne à son titulaire le droit de disposer du bien sans en avoir la jouissance, 
  • l’usufruit qui est le droit d’utiliser le bien ou d’en percevoir les revenus.

2.2. Pour qui ?

L’investissement en nue-propriété d’un bien immobilier est préconisé pour des personnes physiques (particuliers) : 

  • disposent d’un capital à investir (paiement comptant) ou d’une capacité d’épargne importante (financement bancaire). 
  • n’ont pas besoin de revenus immédiats, mais plutôt à terme (différé dans le temps). 
  • sont assujetties à l’IR et/ou à l’IFI (puisque la nue-propriété n’est pas prise en compte dans l’assiette de l’IFI). 

Un non-résident fiscal français peut faire l’acquisition de la nue-propriété d’un bien immobilier. 

Une personne morale soumise à l’IS peut acquérir la nue-propriété d’un bien immobilier. Si elle finance son acquisition à crédit, les intérêts d’emprunt seront déductibles, peu importe la qualité de l’usufruitier. 

Toutefois, cette acquisition a un inconvénient majeur : à l’extinction de l’usufruit ou au jour de la vente du bien par la société, l’usufruit reçu sera taxé à l’IS. La plus-value est alors égale à la différence entre la valeur d’origine de la nue-propriété, diminuée des amortissements pratiqués, et la valeur vénale de l’actif (cédé en pleine propriété). Donc, l’impôt de plus-value est dû sur la valeur de l’usufruit récupérée gratuitement et sur la revalorisation éventuelle de l’immeuble.

2.3. Quel financement ?

Généralement la nue-propriété est payée comptant. L’investisseur place une somme qui va capitaliser mécaniquement, sans imposition. La capitalisation est réalisée en dehors du champ de l’IFI, sans impôt sur le revenu, ni prélèvements sociaux. L’usufruit est récupéré à terme, sans fiscalité, ni frais.  Le recours au crédit bancaire est possible, mais il nécessite un flux de revenus important pour payer les échéances du crédit (aucun revenu locatif n’est perçu pendant toute la durée du démembrement). Le crédit n’est pas déductible de l’IFI (puisque l’actif, la nue-propriété, n’est pas imposable). Toutefois, sous conditions (usufruitier bailleur social ou encaissant des revenus fonciers) les intérêts d’emprunt sont déductibles des revenus fonciers provenant d’autres biens. 

Remarque

Le recours à un prêt in fine, plutôt qu’un crédit amortissable, peut-être judicieux afin de limiter le montant des échéances de remboursement (intérêts d’emprunt et cotisation d’assurance-emprunteur uniquement). Toutefois il sera nécessaire d’adosser un placement financier pour garantir l’emprunt bancaire. 
Le recours au crédit est judicieux si l’investisseur possède par ailleurs des revenus fonciers fortement imposés.

2.4. Quelle durée de démembrement ?

Il s’agit d’acquérir la nue-propriété d’un actif démembré temporairement. 
En général, lors de l’acquisition de la nue-propriété d’un bien immobilier, le démembrement de propriété est constitué pour une durée temporaire entre 10 et 20 ans. 

Remarque :

L’usufruit peut aussi être acheté par une personne physique et la durée du démembrement serait liée à la date de son décès (usufruit viager). Toutefois cette situation est plus rare en pratique.

2.5. Qui détient l’usufruit ?

Le plus souvent, une personne morale que le nu-propriétaire ne connaît pas ; 

  • une société qui souhaite placer sa trésorerie et obtenir un flux de revenus, 
  • une collectivité, un bailleur social ou institutionnel ayant besoin de logements à moindre coût pour remplir sa mission. 

Plus rarement un particulier, faiblement imposé, qui souhaite transformer un capital en flux financier. Il arrive que le nu-propriétaire et l’usufruitier se connaissent. 

2.6. Quel prix d’achat ?

Une décote sur le prix d’achat du bien immobilier est effectuée, représentant la valeur de l’usufruit temporaire. Plus la durée de démembrement est longue, plus la valeur de l’usufruit est importante donc le prix d’achat de la nue-propriété réduit. 

A titre d’illustration :

Durée du démembrementValeur usufruit à durée fixeValeur nue-propriété
15 ans44 %56 %
20 ans54 %46 %
Exemple 

Le nu-propriétaire acquiert la nue-propriété (=210 000 €) d’un bien immobilier  estimé en pleine propriété à : 

  • 375 000 € pour un démembrement de 15 ans, 
  • 456 500 € pour un démembrement de 20 ans.

2.7. Quels frais ?

  • Frais de commercialisation pour l’intermédiaire qui réalise la vente.
  • Rédaction et enregistrement notarié de la convention d’usufruit qui prévoit l’extinction de l’usufruit et l’ensemble des démarches devant être anticipées et réalisées dans les mois qui précèderont la sortie de l’usufruit. 
  • Émoluments du notaire calculés sur la valeur en nue-propriété.

Le prix d’acquisition doit être cohérent avec le marché, tout en tenant compte des particularités de cet achat. 

2.8. En cas de décès du nu-propriétaire pendant le démembrement

Dans l’hypothèse du décès du nu-propriétaire, la nue-propriété du bien immobilier intègre l’actif successoral comme tout autre bien immobilier. La valorisation de cette nue-propriété est actualisée en fonction de la durée restante de l’usufruit au jour du décès.  Notez que parmi les héritiers, on peut retrouver un usufruitier (le conjoint par exemple). Ce dernier percevra son usufruit viager au terme de l’usufruit temporaire en cours. 

2.9. Que se passe-t-il lors de l’extinction de l’usufruit ?

Il n’y a pas de frais pour le nu-propriétaire lorsque l’usufruit prend fin. 

L’investisseur devenu plein propriétaire du bien immobilier pourra alors le conserver pour en percevoir les revenus réguliers et éventuellement en donner la nue-propriété à ses enfants pour anticiper la transmission ou encore le vendre afin de capter la plus-value mécanique réalisée (= valeur de l’usufruit). 

La convention d’usufruit prévoit les obligations de l’usufruitier, entre autres la restitution du logement au plein propriétaire : 

  • libre de toute occupation, sauf volonté du nu-propriétaire de maintenir le locataire dans les lieux avec un nouveau bail,
  • en bon état. Un état des lieux contradictoire peut être effectué lors de la restitution du logement s’il a été prévu dans la convention d’usufruit.

3. Points pratiques

3.1. Mode de détention du bien

L’investissement en nue-propriété d’un bien immobilier peut être réalisé :

  • en direct,
  • par le biais d’une société civile non soumise à l’IS. Dans ce cas, l’avantage IFI est neutralisé, car ce sont les parts (en pleine propriété) de la société qui détient la seule nue-propriété qui devront être déclarées à l’IFI.
  • Il peut être réalisé par une société soumise à l’IS, mais cette solution peut s’avérer coûteuse en terme de plus-value (Cf. infra §2.2.Pour qui ?).

3.2. Fiscalité des revenus

Pendant le démembrement de propriété

Le nu-propriétaire ne perçoit aucun revenu pendant toute la durée du démembrement de propriété. 

Les charges et les intérêts liés à l’emprunt contracté pour acquérir la nue-propriété d’immeubles (et non d’une société immobilière) sont déductibles à condition que le bien soit loué par l’usufruitier et : 

  • qu’il s’agisse d’un bailleur social, 
  • ou qu’il soit imposé pour les loyers qu’il perçoit aux revenus fonciers.

A l’extinction de l’usufruit, la pleine propriété est reconstituée Les flux ultérieurs sont imposés au barème progressif dans la catégorie des revenus fonciers.

3.3. IFI

Pendant le démembrement de propriété La nue-propriété d’un bien immobilier n’est pas taxable au titre de l’IFI. Corrélativement l’emprunt contracté pour l’acquisition de la nue-propriété ne peut pas être inscrit au passif de l’IFI.

Attention 

La nue-propriété détenue par une société est prise en compte pour déterminer la valeur des titres imposables à l’IFI chez l’associé. 

A l’extinction de l’usufruit, la pleine propriété est reconstituée Le bien intègre l’assiette de l’IFI  à concurrence de la valeur vénale en pleine propriété.

3.4. Donation du bien acquis en nue-propriété

La donation d’un bien immobilier nécessite un acte écrit et donc un acte authentique établi par un notaire. 

Le nu-propriétaire peut donner :

  • son droit (il ne sera alors jamais usufruitier ; le donataire nu-propriétaire deviendra plein propriétaire à l’extinction de l’usufruit temporaire).
  • son droit tout en se réservant un « usufruit éventuel pour le futur ». Il récupérera l’usufruit au terme prévu de l’actuel usufruit (à la condition d’être en vie à cette échéance).

3.5. Revente du bien immobilier

Pendant le démembrement de propriété La cession du droit de nue-propriété est libre, il n’est pas nécessaire de demander l’accord de l’usufruitier. La vente porte sur la nue-propriété, pour la durée restante (démembrement fixé initialement). La valeur de la nue-propriété est actualisée au jour de la cession selon la valeur de l’usufruit temporaire.

Avis Fidroit

Le marché secondaire de la nue-propriété est assez limité.  A notre sens, il s’agit d’un placement non liquide. A conserver jusqu’à la réunion de l’usufruit et de la nue-propriété. 

Après le démembrement de propriété, une fois la pleine propriété reconstituée Le nu-propriétaire devenu plein propriétaire est libre de céder le bien.  S’il a choisi de maintenir le locataire dans les lieux, il devra lui proposer le logement à la vente (droit de préemption du locataire).

3.6. Fiscalité de la plus-value en cas de cession

La vente du bien est imposable selon le régime des plus-values immobilières avec une exonération progressive à 22 ans (impôt) et 30 ans (prélèvements sociaux). La plus-value de cession est soumise à l’impôt sur le revenu au taux de 19 % et aux prélèvements sociaux.

Remarque

L’abattement pour durée de détention applicable est décompté à partir de la date d’acquisition de la nue-propriété, même lorsque l’usufruit temporaire a été reçu plus tard. 

Pour la détermination du prix d’acquisition, il conviendra de distinguer deux situations :

  • si la vente intervient avant la réunion de la pleine propriété, la plus-value se calcule uniquement sur la valeur de la nue-propriété du bien. Il faut comparer la valeur d’acquisition de la nue-propriété avec la valeur de revente de la nue-propriété, calculée en tenant compte de la durée restante de l’usufruit. 
  • si la vente intervient après la réunion de l’usufruit et de la nue-propriété, le prix de revient de l’immeuble cédé en pleine propriété est la valeur de la pleine propriété au jour de l’acquisition de la nue-propriété. Cette solution, est favorable, car l’usufruit est acquis gratuitement.
Remarque

Si le terme du démembrement est proche, il est plus avantageux fiscalement d’attendre l’extinction de l’usufruit pour vendre le logement. 

Acquisition de la nue-propriété pour 170 000 €, démembrement de 15 ans, valeur de la pleine propriété 303 500 €. 

  • En cas de cession au bout de 9 ans, on compare la valeur actualisée de la nue-propriété, soit 240 000 € et la valeur d’acquisition de la nue-propriété soit 170 000 €. La plus-value immobilière imposable est estimée à 70 000 € (avant abattements pour durée de détention).
  • En cas de cession après extinction de l’usufruit, on compare la valeur de la pleine propriété lors de l’acquisition de la nue-propriété, soit 303 500 € avec la valeur actuelle de la pleine propriété, également 303 500 € (pas de revalorisation du bien). La plus-value imposable est estimée à 0 €.

4. Devoir de conseil – Information sur les risques de l’opération

4.1. Information sur les caractéristiques du placement

  • Nature du placement
  • Modalités de financement
  • Frais liés à l’acquisition
  • Rendement
  • Durée d’investissement
  • Modalité de revente 

4.2. Information sur l’opportunité de l’investissement

  • Situation fiscale de l’investisseur
  • Objectifs
  • Profil de risque

4.3. Information sur la fiscalité

  • Fiscalité des revenus et plus-values
  • Déductibilité des intérêts d’emprunt
  • IFI

4.4. Information sur les risques économiques

  • Absence de garantie en capital
  • Soumission aux fluctuations du marché immobilier
  • Absence de garantie du rendement
  • Risques sur la valorisation du bien
  • Défaut de l’usufruitier