Le démembrement de propriété est un acte juridique qui consiste à diviser la pleine propriété d’un bien en deux parties distinctes:

  • La nue-propriété (le droit de détenir le bien)
  • L’usufruit (le droit de disposer du bien, et d’en percevoir les fruits éventuels)

Il confère à l’acquéreur en nue-propriété plusieurs avantages :

  • Coût de l’opération réduit (Achat avec importante décôte, de l’ordre de 30 à 40%)
  • Neutralité fiscale (pas de CSG, CRDS, ni impôt foncier)
  • Charges supportées par l’usufruitier
  • En cas de transmission, coût réduit de la donation (portant sur la nue-propriété)
  • Facilités pour un expatrié de se constituer un patrimoine (le bien immobilier acquis se situant en France , il n’aura pas à effectuer tous les actes quotidiens d’administration, ceux-ci incombant à l’usufruitier)

Le principe d’un démembrement de propriété

Explications en vidéo par notre partenaire juridique Fidroit :

1. Définition

La propriété se définit comme “le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements.”
C. civ. art. 544

Le droit de propriété est un droit réel qui confère à celui qui en est titulaire toutes les prérogatives qu’il est possible d’avoir sur un bien, savoir :

  • l’usus : le droit de détenir et d’utiliser la chose ou le bien,
  • le fructus : le droit de percevoir les revenus (fruits) d’une chose ou d’un bien,
  • l’abusus : le droit de disposer de la chose ou du bien (vendre, donner, modifier).

1.1. Définition

Le droit de propriété peut faire l’objet d’un démembrement c’est-à-dire d’une répartition des prérogatives qu’il confère.

Le démembrement donne lieu à la coexistence de 2 droits réels : l’usufruit et la nue-propriété.
 

Contrairement à l’indivision, ces deux droits réels ne s’exercent pas simultanément mais distinctement et indépendamment. Par conséquent, il n’est pas possible de demander le partage si les personnes ne disposent pas de droit de même nature.

Cass. civ 1. 9 sept. 2015, n° 14-18906

L’usufruit est un droit réel temporaire. A son extinction, le nu-propriétaire devient alors plein propriétaire.

La notion de droit réel s’oppose à la notion de droit personnel. (A la différence du droit réel, le droit personnel – par exemple le droit d’usage et d’habitation- est incessible, intransmissible et insaisissable).

Le titulaire de l’usufruit ou de la nue-propriété d’un bien est détenteur d’un droit réel. Il a donc la possibilité de céder son droit réel, à titre gratuit (donation, testament) ou à titre onéreux (vente, échange, apport en société) et de le donner en garantie (hypothèque). La nue-propriété est, en outre, transmissible par succession.

L’acquéreur et le donateur auront alors les mêmes obligations que l’usufruitier ou le nu-propriétaire d’origine.

1.2. Usufruit et quasi-usufruit

“L’usufruit est le droit de jouir des choses dont un autre a la propriété comme le propriétaire lui-même, mais à la charge d’en conserver la substance.”
C. civ. art. 544

L’usufruit peut porter sur tous les biens meubles ou immeubles, y compris sur une somme d’argent (il s’agit dans ce cas du quasi-usufruit).

1.2.1. Droits de l’usufruitier

L’usufruit est un droit réel temporaire.

L’usufruitier peut :

  • utiliser librement le bien, en occupant l’immeuble par exemple,
  • en percevoir les revenus, en louant l’immeuble à un tiers par exemple,
  • céder ou donner librement son droit, sauf clause contraire figurant dans le contrat ou l’acte lui accordant l’usufruit.

1.2.2. Devoirs de l’usufruitier

1.2.2.1. Avant l’entrée en jouissance de son droit

L’usufruitier a l’obligation de dresser un inventaire des meubles et des immeubles sur lesquels porte son droit.

Il doit en principe fournir caution et s’engager à jouir du bien en bon père de famille (c’est-à-dire en faire une utilisation normale).

Remarque :

Il peut en être dispensé par le disposant ou obtenir cette dispense auprès du nu-propriétaire.

1.2.2.2. A partir de l’entrée en jouissance

L’usufruitier a l’obligation :

  • de conserver la substance du bien,
  • de maintenir sa destination,
  • d’entretenir le bien en bon état (l’usufruitier n’a cependant pas l’obligation de procéder aux travaux de grosses réparations car celles-ci sont à la charge du nu-propriétaire).

Les modalités de contribution de l’usufruitier et du nu-propriétaire sont codifiées aux articles 610 et 612 du Code civil

L’article 612 du Code civil dispose de 3 possibilités :

  • l’usufruitier avance la somme et possède en contrepartie un droit à sa restitution en fin d’usufruit sans intérêt,
  • le nu-propriétaire assure le paiement de la dette et l’usufruitier lui doit les intérêts de la somme payée,
  • le nu-propriétaire fait vendre une partie des biens soumis à usufruit pour acquitter le passif.
1.2.2.3. À l’extinction

À l’extinction de l’usufruit, l’usufruitier a l’obligation de restituer le bien au nu-propriétaire.

1.2.3. Durée de l’usufruit

1.2.3.1. Si l’usufruitier est une personne physique

Sauf s’il fait l’objet d’une cession à titre onéreux, l’usufruit s’éteint :

  • au jour du décès de l’usufruitier,
  • à l’arrivée du terme dans le cas d’un usufruit temporaire, sauf si le décès intervient préalablement au terme fixé.
1.2.3.2. Si l’usufruit est accordé en fonction de l’âge d’un tiers

“L’usufruit accordé jusqu’à ce qu’un tiers ait atteint un âge fixé dure jusqu’à cette époque, encore que le tiers soit mort avant l’âge fixé.”

C. civ. art. 620

Ce type d’usufruit est rarement usité.

1.2.3.3. Si l’usufruitier est une personne morale

L’usufruit ne peut être que d’une durée maximale de 30 ans

“L’usufruit qui n’est pas accordé à des particuliers ne dure que 30 ans.”
C. civ. art. 619

Il ne peut en aucun cas être dérogé à cette disposition car elle est d’ordre public.

Cass. civ 3, 7 mars 2007
Rép. min. LAMBERT, 2 juill. 2013

L’usufruit accordé sur des logements à une personne morale ne peut être d’une durée inférieure à 15 ans

“L’usufruit d’un logement ou d’un ensemble de logements peut être établi par convention au profit d’une personne morale pour une durée minimale de 15 années, en vue de la location de ce ou ces logements.”

CCH. L.253-1

Il ne peut en aucun cas être dérogé à cette disposition car elle est d’ordre public.

Rép. min. 9 juin 2009

Attention:

L’usufruit, même constitué pour une durée fixe, s’éteint avec la disparition de l’usufruitier “initial”, personne physique ou morale.
L’extinction de l’usufruit, viager ou temporaire, met immédiatement fin au démembrement de propriété.

1.2.4. Particularités du quasi-usufruit

1.2.4.1. Quasi-usufruit automatique

Quasi-usufruitLorsque l’usufruit porte sur une somme d’argent, des grains ou des liqueurs et les choses fongibles et consomptibles au premier usage, il est soumis au régime juridique particulier du quasi-usufruit.

C. civ. art. 587 Le titulaire d’un quasi-usufruit est investi des pouvoirs de disposition sur les biens tandis que le nu-propriétaire bénéficie d’un simple droit de créance.

Le quasi-usufruitier est par conséquent tenu de restituer la chose lors de l’extinction de son droit.

Cette restitution s’effectue soit par la remise de choses de même quantité et qualité soit en valeur.

Pour plus d’élément, voir notre Doc. expert 

1.2.4.2. Quasi-usufruit conventionnel

Le quasi-usufruit peut également être conventionnellement appliqué à un bien non consomptible. Mais, l’usufruit ne pourra être transformé en quasi-usufruit conventionnel qu’à la condition qu’il porte sur une chose fongible ou une chose de genre.

Il faut que la restitution de la chose ou du bien soit possible en nature ou par équivalent (possibilité de racheter une chose semblable).

Il ne peut toutefois pas porter sur un immeuble ou sur des titres sociaux dont la détention confère la direction de l’entreprise ou une minorité de blocage.

1.2.4.3. Modalités de gestion du quasi-usufruit

Que le quasi-usufruit soit légal ou conventionnel, il confère à l’usufruitier le pouvoir de disposer du bien, c’est pourquoi, afin de protéger le nu-propriétaire, il est conseillé :

  • d’établir une convention de quasi-usufruit (par acte sous seing privé ou par acte notarié),
  • et de procéder à l’enregistrement de cette créance (si la convention n’a pas été rédigée en la forme authentique).
Remarque :

L’enregistrement va donner date certaine à la créance, ce qui est très utile si le quasi-usufruit est conventionnel et/ou s’il porte sur des capitaux provenant d’un contrat d’assurance-vie.

Ainsi la créance constituera un élément du passif successoral non pris en compte pour le calcul des droits de succession.

CGI. art. 773 2°

La convention de quasi-usufruit est recommandée car elle offre plus de garanties au nu-propriétaire.

Elle contient généralement :

  • la répartition des droits entre l’usufruitier et le nu-propriétaire,
  • l’inventaire des biens démembrés,
  • une caution ou une garantie équivalente,
  • et une obligation d’emploi.

1.3. Nue-propriété

La nue-propriété est un droit réel portant sur le bien démembré. Le détenteur de ce droit est appelé nu-propriétaire.

Le nu-propriétaire doit laisser l’usufruitier :

  • entrer en possession du bien,
  • jouir du bien,
  • et percevoir les fruits et revenus du bien.

“Les grosses réparations demeurent à la charge du nu-propriétaire, à moins qu’elles n’aient été occasionnées par le défaut de réparations d’entretien, depuis l’ouverture de l’usufruit ; auquel cas l’usufruitier en est aussi tenu.” C. civ. art. 605

Remarque :

Contrairement au nu-propriétaire, l’usufruitier ne peut le forcer à réaliser des travaux de grosses réparations.

Cass. civ. 3, 30 janv. 1970
Cass. civ. 1, 18 déc. 2013 Le nu-propriétaire est titulaire d’un droit réel, lequel est par conséquent cessible, transmissible et saisissable.

A l’extinction de l’usufruit, le nu-propriétaire devient automatiquement plein propriétaire, et ce, sans aucune imposition.
CGI. art. 1133

1.4. Bien objet du démembrement

Le démembrement peut porter sur :

Remarque : démembrement d’une créance

La loi ne prévoit pas de régime particulier au démembrement de créance. On doit ainsi appliquer les principes généraux du démembrement.

L’usufruitier a seul qualité pour recevoir le remboursement des créances exigibles sans le consentement du nu-propriétaire et peut même être autorisé à poursuivre le débiteur en paiement.
Cass. civ. 1 4 oct. 1989
Cass. com. 12 juill. 1993

Il doit, agissant en administrateur avisé et en bon père de famille, en poursuivre le remboursement quand elles sont devenues exigibles. A défaut il engagerait sa responsabilité vis-à-vis du nu-propriétaire de la perte de la créance.
Lors du remboursement, il donne valablement quittance au débiteur.

Si le paiement éteint la créance, le démembrement se poursuit par le jeu de la subrogation réelle. Selon la majorité de la doctrine, l’usufruit se reporte alors sur la somme d’argent reçue en paiement sous la forme d’un quasi-usufruit.
Cass. civ. 1 17 mars 2010

Il est cependant possible de déroger aux règles légales par la convention. On pourra, dans l’acte constitutif ou dans une convention postérieure à l’ouverture à l’usufruit, prévoir le concours du nu-propriétaire à l’encaissement et obliger l’usufruitier à emploi.

1.5. Terme du démembrement

L’extinction de l’usufruit marque la fin du démembrement.

L’usufruit s’éteint :

  • par le décès de l’usufruitier,
  • par la dissolution de la personne morale bénéficiaire d’un usufruit temporaire,
  • par l’expiration du temps pour lequel il a été accordé (L’usufruit qui n’est pas accordé à des particuliers ne dure que trente ans),
  • par la consolidation ou la réunion sur la même tête, des 2 qualités d’usufruitier et de propriétaire, par le non-usage du droit pendant 30 ans,
  • par la perte totale de la chose sur laquelle l’usufruit est établi,
  • par la vente amiable d’un bien démembré et le partage du prix de vente,
  • ou par l’abandon ou la renonciation à l’usufruit.
Remarque :

Si l’abandon d’usufruit est motivé par une intention libérale, il devrait être soumis aux droits de donation.

Ici, il y aurait lieu de démontrer :

  • l’intention libérale,
  • le dessaisissement immédiat et irrévocable du donateur entraînant son appauvrissement,
  • et l’acceptation par le bénéficiaire, ayant pour conséquence un enrichissement à due concurrence.

Il appartient ainsi à l’administration de prouver l’existence de ces 3 éléments pour soumettre l’acte en cause aux droits de mutation à titre gratuit, l’existence desdits éléments étant souverainement appréciée par les juges du fond (Cass. 1re civ. 24 novembre 1965 – Cass. 1re civ. 07 février 1967).

BOI-ENR-DMTG-20-10-10 n°100

L’extinction de l’usufruit peut aussi résulter d’une jouissance abusive de l’usufruitier, laissant, faute d’entretien, le bien se dégrader ou pire dépérir.

En fonction de la gravité des dégâts, les juges peuvent alors :

  • prononcer l’extinction absolue de l’usufruit : le nu-propriétaire devient alors plein propriétaire,
  • ou ordonner l’entrée en jouissance du nu-propriétaire, à charge pour lui de payer annuellement à l’usufruitier, ou à ses ayants cause, une somme déterminée jusqu’à l’extinction de l’usufruit (par le décès de l’usufruitier ou l’arrivée du terme).
Remarque :

L’usufruitier et le nu-propriétaire se partagent la propriété d’un même bien mais cette situation n’est pas une situation d’indivision.
L’indivision est une concurrence de droit de même nature (souvent en pleine propriété), alors qu’en matière de démembrement les droits des parties ne sont pas de même nature (usufruit et nue-propriété).
Il n’est donc pas possible de mettre fin au démembrement par le partage, sauf dans le cas d’une indivision sur un droit démembré.

En cas d’indivision en jouissance (usufruit), l’indivisaire peut demander le partage par voie de cantonnement sur un bien. Si cela n’est pas possible, par la licitation du seul usufruit. La licitation peut porter sur la pleine propriété si c’est la seule solution pour préserver l’intérêt de tous les titulaires de droits.

En cas d’indivision en nue-propriété, il est possible de partager par voie de cantonnement sur un bien, ou par licitation de la seule nue-propriété.
​Pour faire la licitation sur la pleine propriété, il faudra l’accord de l’usufruitier.

C. civ. art 817, 818 et 819

2. Évaluation des droits démembrés

2.1. Usufruit viager

2.1.1. Évaluation fiscale

Les valeurs fiscales de l’usufruit et de la nue-propriété d’un bien sont fixées forfaitairement à une fraction de la valeur de la pleine propriété du bien.

Ces valeurs constituent l’assiette du calcul des droits de mutation à titre gratuit (donations, successions) ou à titre onéreux (ventes, échanges).

Elles sont déterminées en fonction de l’âge de l’usufruitier, conformément au barème établi par l’administration fiscale (CGI. art. 669) depuis le 1er janvier 2004.

Age de l’usufruitierValeur de l’usufruitValeur de la nue-propriété
Moins de 21 ans9010
De 21 à 30 ans8020
De 31  à 40 ans7030
De 41 à 50 ans6040
De 51 à 60 ans5050
De 61 à 70 ans4060
De 71 à 80 ans3070
De 81 à 90 ans2080
A partir de 91 ans1090

2.1.2. Évaluation économique

L’évaluation économique est la méthode d’actualisation des flux de revenus futurs. La valeur d’un bien est égale à la somme actualisée de revenus que ce bien procurera dans le futur.

2.2. Usufruit temporaire

2.2.1. Évaluation fiscale

Contrairement à l’usufruit viager, la valeur fiscale de l’usufruit temporaire n’est pas déterminée en fonction de l’âge de l’usufruitier mais évaluée à 23 % de la valeur de la pleine propriété par période de 10 ans.

Ce taux de 23 % s’applique par tranche de 10 ans même si l’usufruit n’est pas constitué pour toute la durée de la tranche.

Exemples :
  • la valeur d’un usufruit temporaire d’une durée de 20 ans est égale à 46 % de la valeur de la pleine propriété du bien démembré,
  • un usufruit temporaire d’une durée de 12 ans est également évalué à 46 % de la pleine propriété du bien démembré,
  • un usufruit temporaire d’un an sera évalué à 23 % de la pleine propriété du bien démembré.

Cette règle ne peut en aucun cas avoir pour effet :

  • de donner à l’usufruit une durée supérieure à la durée de l’espérance de vie de l’usufruitier,
  • de donner à l’usufruit consenti à une personne morale une durée supérieure à 30 ans.

2.2.2. Évaluation économique

L’évaluation économique du quasi-usufruit pourra également être utilisée à des fins civiles.BOI-ENR-DMTG-10-40-10-50

3. Fiscalité – IR

3.1. Revenus fonciers (RF)

3.1.1. Imposition

L’impôt sur le revenu ainsi que les prélèvements obligatoires sont supportés par l’usufruitier puisque c’est lui qui encaisse les loyers.

3.1.2. Déductibilité des charges

Pour l’usufruitier

L’usufruitier a la possibilité d’opérer des déductions au titre d’éventuels intérêts d’emprunt liées à son acquisition s’il loue le bien puisqu’il est taxable aux revenus fonciers (règles de droit commun applicables).

Pour le nu-propriétaire

Si l’immeuble est loué nu et qu’il génère des revenus fonciers le nu-propriétaire peut déduire de ses revenus fonciers le montant (dans une certaine limite) des travaux qu’il a supportés et les éventuels intérêts d’emprunt liés à l’acquisition de la nue-propriété.

BOI-RFPI-CHAMP-30-30

Pour les dépenses effectuées avant le 31 décembre 2016, le nu-propriétaire peut également, sur option,déduire de son revenu global le montant des travaux de grosses réparations qu’il a supportés.

Ce dernier dispositif n’était pas conditionné à la location nue, générant des revenus fonciers, de l’immeuble démembré.

Il a été supprimé par la loi de finances pour 2017.
BOI-RFPI-BASE-30-20-20

3.2. Location meublée

Juridiquement il est possible de démembrer (acquisition en démembrement ou donation de la nue-propriété) : 

  • l’immeuble loué en location meublé 
  • les titres de sociétés détenant des immeubles loués en location meublé

L’usufruitier dispose des  pouvoirs d’administration et peut conclure et renouveler les baux d’habitation et professionnels (mais pas de baux commerciaux).
 

Attention :

L’usufruitier ne peut amortir, après la donation, que son droit d’usufruit.
CE 24 avril 2019, n° 419912
CAA Nancy 22 fev. 2018, n° 17NC00780
TA Strasbourg 14 mars 2017, n°1602812

Cependant, la position de l’administration fiscale au BOFiP n’a cependant pas été modifiée et exclut encore, à ce jour, l’amortissement d’un droit d’usufruit, à durée fixe ou non (en matière de BIC, IS, BA ou BNC).
BOI-BIC-AMT-10-20 § 260
RM Frassa, JO Sénat du 14 déc. 2017, n°01405

3.3. Revenus de capitaux mobiliers (RCM)

En principe, c’est l’usufruitier qui est taxable, dans les conditions de droit commun, à l’impôt sur le revenu.

Toutefois, conventionnellement, les parties peuvent prévoir une répartition différente des résultats et de l’imposition.

4. Fiscalité – IFI / ISF

4.1. IFI à compter du 1er janvier 2018

L’IFI ne concerne que les actifs immobiliers (qu’ils soient détenus en direct, via une société ou des unités de comptes d’un contrat d’assurance-vie ou de capitalisaiton).

4.1.1. Principe – Imposition de l’usufruitier

Les biens grevés d’usufruit sont en principe compris dans le patrimoine du seul l’usufruitier pour leur valeur en pleine propriété des actifs immobiliers.
CGI. art. 968
BOI-PAT-IFI-20-20-30-10

4.1.2. Exception – Imposition séparée de l’usufruitier et du nu-propriétaire

Une imposition séparée entre l’usufruitier et le nu-propriétaire sur la base de leurs droits respectifs évalués conformément au barème fiscal (CGI. art. 669) est prévue dans les cas de démembrement résultant :

  • de l’usufruit légal du conjoint survivant quelle que soit la date du décès (CGI. ancien article 767, CGI. art. 757)
  • de l’usufruit dont le conjoint survivant bénéficie en présence d’enfants du premier lit (C. civ. art. 1098),
  • de l’usufruit dont les ascendants ont pu bénéficier dans les successions ouvertes avant le 1er janvier 2007 (C. civ. art. 1094 dans sa rédaction antérieure au 1er janvier 2007),
  • de la vente du bien avec réserve d’usufruit à un acquéreur autre qu’un présomptif héritier ou descendant de ce dernier, bénéficiaire d’une précédente donation ou personne interposée au sens de l’article 751 du CGI,
  • de la donation ou d’un legs avec une réserve d’usufruit consenti à l’Etat, à un département, à une commune ou à une association d’utilité publique.

4.1.3. Quasi-usufruit

Attention : 

Les créances de restitutions (issues d’un quasi-usufruit) ne sont en principe pas déductible (sauf si elles se rapportent à un actif immobilier imposable). Les créances de restitution créées suite à la vente d’un bien immobilier ne sont pas des dettes contractées pour l’acquisition d’un actif imposable et ne sont donc pas déductibles

Lorsque le quasi-usufruitier utilise les sommes issues d’un quasi-usufruit pour acquérir un bien immobilier, la créance de restitution n’a, à notre sens, pas été contractée directement pour acquérir un bien immobilier et ne serait donc pas déductible

4.2. ISF jusqu’en 2017

4.2.1. Principe – Imposition de l’usufruitier

Les biens grevés d’usufruit étaient en principe compris dans le patrimoine de l’usufruitier pour leur valeur en pleine propriété.
CGI. art. 885 G
BOI-PAT-ISF-30-20-20

4.2.2. Exception – Imposition séparée de l’usufruitier et du nu-propriétaire

Une imposition séparée entre l’usufruitier et le nu-propriétaire sur la base de leurs droits respectifs évalués conformément au barème fiscal (CGI. art. 669) est prévue dans les cas de démembrement résultant :

  • de l’usufruit légal du conjoint pour les successions ouvertes avant le 1er juillet 2002,
  • de l’usufruit dont le conjoint survivant bénéficie en présence d’enfants du premier lit,
    C. civ. art. 1098
  • de l’usufruit dont les ascendants ont pu bénéficier dans les successions ouvertes avant le 1er janvier 2007,
    C. civ. 1094 rédaction antérieure au 1er janvier 2007
  • de la vente du bien avec réserve d’usufruit à un acquéreur autre qu’un présomptif héritier ou descendant de ce-dernier, donataire, légataire ou personne interposée,
  • de la donation ou d’un legs avec une réserve d’usufruit consenti à l’Etat, à un département, à une commune ou à une association d’utilité publique.
    BOI-PAT-ISF-30-20-20, § 60 et s.

5. Fiscalité – Plus-value (Cession du bien)

5.1. Sort du prix de vente

5.1.1. Cession de la pleine propriété

L’usufruitier et le nu-propriétaire doivent céder conjointement la pleine propriété des biens. Dans ces circonstances, ils peuvent :

 Se répartir le prix de vente (c’est le principe).Le démembrement prend fin
C. civ. art. 621 al. 1
La répartition peut être réalisée selon une évaluation économique ou fiscale (voir nos Doc. Expert. Évaluation fiscale des droits démembrés et Évaluation économique des droits démembrés)
Remployer le prix de vente dans un bien démembré Le démembrement perdure. Exemple :  Remploie dans un contrat de capitalisation 
Mémo : Comparaison pour le remploi de capitaux démembrés sur un contrat de capitalisation ou un contrat d’assurance-vie Il est recommandé d’établir une convention de démembrement afin de déterminer les droits et obligations des parties.
Voir notre stratégie client : Souscrire un contrat de capitalisation
Attribuer la totalité du prix de vente à l’usufruitier (en quasi-usufruit)Le démembrement prend fin : le quasi-usufruitier est plein propriétaire des liquidités qu’il peut réinvestir librement sous son seul nom.
En contrepartie le nu-propriétaire devient titulaire d’une créance de restitution à valoir au décès du quasi-usufruitier et correspondant au montant total du prix de vente.

Il est recommandé d’établir une convention de quasi-usufruit afin de date certaine à la créance du nu-propriétaire (et de pouvoir la déduire fiscalmenet de l’actif successoral du quasi-usufruitier) et de prévoir une éventuelle indexation de la créance.
Voir notre modèles de convention de quasi-usufruit

5.1.2. Cession isolée de droits démembrés

L’usufruitier peut céder son usufruit isolément (soit de manière viagère ou pour une durée fixe – cession d’usufruit temporaire), de même que le nu-propriétaire peut céder sa nue-propriété isolément : il n’existe pas de droit de préemption en présence d’un démembrement (contrairement à l’indivision).

5.2. Cession à titre gratuit

La cession à titre gratuit (donation, transmission par décès) n’entraîne pas d’imposition de la plus-value privée (seuls les droits de mutation à titre gratuit sont exigibles).

Par ailleurs, en cas de cession à titre onéreux par la suite par le donataire, l’héritier ou le légataire, son prix d’acquisition sera constitué de la valeur du bien au jour de la donation ou du décès, ainsi la plus-value latente constatée au jour de la donation ou du décès est purgée et ne sera jamais à acquitter (ni par le donataire / défunt ni par le donataire / héritier / légataire).

5.3. Cession à titre onéreux

La plus-value est due en cas de cession à titre onéreux de la nue-propriété et / ou de l’usufruit viager. Cette plus-value est taxée selon le régime des plus-value immobilières des particuliers (lorsque le démembrement porte sur un immeuble) ou le régime des plus-value de valeurs mobilières (lorsque le démembrement porte sur des titres de sociétés).

Le calcul de la plus-value différent selon que l’on cède pendant le démembrement (cession de droits démembrés) ou que l’on cède après la fin du démembrement (cession de la pleine propriété après réunion de l’usufruit).

5.4. Cas particulier : cession d’usufruit temporaire, cession à durée fixe (CGI. art. 13.5)

La troisième loi de finances rectificative pour 2012 (art.15) a introduit, pour les cessions réalisées depuis le 14 novembre 2012, une dérogation aux règles applicables aux plus-values : le produit de la première cession à titre onéreux d’un usufruit temporaire ou, si elle est supérieure sa valeur vénale, est potentiellement imposable dans la catégorie de revenu susceptible d’être procuré par le bien objet de l’usufruit temporaire.

CGI. art. 13, 5°

BOI-IR-BASE-10-10-30

Remarque : 

L’option prise de procéder à une cession d’usufruit temporaire plutôt qu’un contrat de bail n’est pas abusive : la cession d’usufruit produit des effets économiques et juridiques distinct d’un bail dès lors que le cédant reçoit un prix immédiatement (et non un loyer échelonné).

CAA Nantes 31 mai 2018, n°16NT04182
CAA Nantes 31 mai 2018, n°16NT04184

5.4.1. Champ d’application

5.4.1.1. Cessionnaire

Aucune condition particulière ne doit être remplie pour l’application du 5° de l’article 13 du Code général des impôts.
Cela signifie que, peu importe la qualité du cédant, le produit de la première cession de l’usufruit à durée fixe ou, si elle est supérieure, sa valeur vénale, est imposable dans la catégorie de revenu susceptible d’être procuré par le bien (RF, BIC) si les autres conditions sont remplies par ailleurs.
BOI-IR-BASE-10-10-30, § 20

5.4.1.2. Cédant

Les dispositions de l’article 13, 5° du Code général des impôts s’appliquent :

  • aux personnes physiques agissant dans le cadre de leur patrimoine privé ou professionnel,
  • aux associés de personnes morales non soumises à l’IS lorsque la société vend un usufruit à durée fixe.

BOI-IR-BASE-10-10-30, § 10

Remarque :

Le cédant résident fiscal étranger est également concerné si, après consultation de la convention, il est taxable en France au titre des plus-values (mobilière ou immobilière en fonction de la nature du bien sur lequel porte la cession de l’usufruit temporaire).
S’il est imposable en France au titre de la plus-value, le produit de la cession ou, si elle est supérieure sa valeur vénale, est imposable dans la catégorie de revenu susceptible d’être procuré par le bien (RF, BIC).

5.4.1.3. Opérations concernées

Ce dispositif concerne exclusivement les cessions à titre onéreux c’est à dire :

  • la vente,
  • l’échange,
  • l’apport à société (IR ou IS).

BOI-IR-BASE-10-10-30, § 60

L’article 13, 5° du Code général des impôts ne s’applique que pour la première cession de l’usufruit à durée fixe réalisée depuis le 14 novembre 2012 d’un même bien, par un même cédant :

  • seule la première cession pour une durée fixe est taxable comme revenu : A vend un usufruit temporaire à B, A est taxé selon les règles des revenus.
  • si au terme de cette durée, A recouvre la pleine propriété et réalise une nouvelle cession à C, elle sera alors à nouveau imposée selon les règles de l’article 13, 5°.
  • toutefois, en cas de cessions successives, si B qui vient d’acquérir l’usufruit temporaire, le revend à C pour sa durée résiduelle, alors cette deuxième cession est taxable selon les règles des plus-values. Remarque : Lorsque l’usufruit temporaire consenti par le contribuable s’éteint à l’arrivée du terme et que ce dernier consent un nouvel usufruit temporaire, chacune de ces cessions s’analyse comme une première cession portant sur un usufruit temporaire (un seul et même usufruit), ce qui n’est pas le cas des cessions successives portant sur un même usufruit temporaire. 
    Voir exemple :  BOI-IR-BASE-10-10-30, § 70

Lorsque le propriétaire en pleine propriété se démunit définitivement de son bien en cédant de manière concomitante l’usufruit à durée fixe et la nue-propriété il est également concerné par l’application de l’article 13,5 ° du CGI.
Peu importe que le propriétaire en pleine propriété se dessaisisse définitivement ou non du bien, c’est à dire qu’il cède uniquement l’usufruit à durée fixe et conserve la nue-propriété ou qu’il cède l’usufruit à durée fixe et la nue-propriété, en l’absence de précision légale, c’est l’opération consistant à céder, à titre onéreux, l’usufruit à durée fixe d’un bien qui déclenche l’imposition du produit résultant de la vente comme un revenu.
RM LAMBERT, 02 juill. 2013 (voir notre actualité)
BOI-IR-BASE-10-10-30, § 90

5.4.1.4. Objet de la cession

Le régime fiscal de l’article 13, 5° du Code général des impôts s’applique aux cessions d’usufruit à durée fixe quelque soit la nature du bien sur lequel le droit porte.
BOI-IR-BASE-10-10-30, § 100

Usufruit cédé à une personne physique

Ce dispositif ne concerne que les cessions d’usufruits consentis pour une durée à terme fixe peu importe qu’il soit constitué sur un bien détenu en pleine propriété ou soit préconstitué du fait d’un démembrement antérieur.
BOI-IR-BASE-10-10-30, § 80

Usufruit cédé à une personne morale

Si l’usufruit est constitué sur un bien détenu en pleine propriété

L’usufruit étant obligatoirement constitué pour une durée fixe, maximum 30 ans, les dispositions du 5° de l’article 13 du Code général des impôts s’appliquent.
BOI-IR-BASE-10-10-30, § 90
Rép. min. LAMBERT du 02 juillet 2013

Si l’usufruit est préconstitué du fait d’un démembrement antérieur

  • Si la cession porte sur un usufruit viager: la cession ou l’apport est réalisé sans précision de durée, ne rentre pas dans le champ d’application de l’article 13, 5° du Code général des impôts. La cession sera donc imposée au titre des plus-values.
Remarque :

La cession ou l’apport conjoint de l’usufruit et de la nue-propriété d’un bien n’est donc pas concerné par le dispositif, c’est le régime des plus-values qui a vocation à s’appliquer à l’opération.

  • Si la cession porte sur un usufruit à durée fixe : la cession ou l’apport est réalisé en précisant une durée fixe, rentre dans le champ d’application de l’article 13, 5° du Code général des impôts et génère donc un revenu imposable.
    BOI-IR-BASE-10-10-30, § 90

5.4.2. Régime d’imposition

5.4.2.1. Détermination de la catégorie de revenus de rattachement

Le montant imposable est soumis à l’impôt sur le revenu, dans la catégorie des revenus susceptibles d’être procurés par l’actif dont l’usufruit est cédé, aux prélèvements sociaux et, le cas échéant, à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus.

CGI. art. 233 sexies

On peut ainsi citer :

Nature du bienCatégorie de revenu de rattachement
Un immeuble loué nu ou un immeuble de jouissanceRevenus Fonciers
Unimmeuble loué en meubléBIC
Une société à prépondérance immobilière non soumis à l’IS (dont l’actif est, à la clôture des trois exercices qui précèdent la cession, constitué pour plus de 50 % de sa valeur réelle par des immeubles ou droits immobiliers, non affectés par la société à sa propre exploitation) ou une SCPIRevenus Fonciers
Une société soumise à l’IS, obligations, créances, OPCVM ou autres titres mentionnés à l’article 150-0 A du CGI (*)Revenus de capitaux mobiliers

(*) BOI-IR-BASE-10-10-30, § 210

En cas de difficulté pour déterminer la catégorie de rattachement, on retient les règles des BNC.

BOI-IR-BASE-10-10-30, § 140

Remarque :

Lorsque l’usufruit temporaire cédé procure ou est susceptible de procurer, au jour de la cession, des revenus imposables relevant de plusieurs catégories de revenus, le produit résultant de la cession de cet usufruit ou, si elle est supérieure, sa valeur vénale est répartie dans chacune de ces catégories.

BOI-IR-BASE-10-10-30, § 150

5.4.2.2. Montant imposable

Le montant imposable est la valeur de l’usufruit et non la seule plus-value générée par l’opération.

Ainsi, le produit imposable est égal :

  • au prix de cession de l’usufruit à durée fixe porté dans l’acte,
  • ou à sa valeur vénale si elle est supérieure.

BOI-IR-BASE-10-10-30, § 180

Remarque :

L’administration ne fait pas spécialement référence à la valeur économique de l’usufruit.
Elle admet ” à titre indicatif ” que sa valeur vénale soit déterminée par application de l’article 669 du CGI sur la valeur réelle en pleine-propriété du bien. C’est-à-dire 23 % pour chaque période de 10 ans entamée, quel que soit l’âge de l’usufruitier. Ainsi, un usufruit d’une durée fixée à 18 ans vaut 46 % (2 x 23 %) de la valeur vénale de l’actif.

On sera vigilant sur la protection apportée par ce tempérament apparent nuancé par le terme “à titre indicatif”.
BOI-IR-BASE-10-10-30, § 190

5.4.2.3. Modalités d’imposition

L’impôt et les prélèvements sociaux sont calculés dans les conditions de droit commun applicables au revenu de rattachement l’année de la cession.

Remarque :

Les abattements pour durée de détention ou autres exonérations prévues en matière de plus-values mobilières ou immobilières sont sans effet.
Par exemple, la cession de l’usufruit temporaire d’une résidence principale est taxable.

Pour les revenus de capitaux mobiliers, l’acompte à vocation à s’appliquer mais, en cas d’option globale pour le barème progressif, l’abattement de 40 % pour les dividendes ne s’applique pas.BOI-IR-BASE-10-10-30, § 210

Remarque :

Les dispositions de l’article 163-0 A du CGI (revenus exceptionnels) sont éventuellement applicables afin de limiter la progressivité de l’impôt sur le revenu.

6. Textes de référence