Créer une SCI pour transmettre à ses enfants

Objectifs :

  • transmettre de son vivant,
  • pallier les inconvénients d’un décès soudain,
  • conserver les revenus et le contrôle des biens.

La constitution d’une société civile permet :

  • de transmettre un patrimoine immobilier en conservant le contrôle et la jouissance des biens,
  • de transmettre les actifs progressivement, 
  • d’éviter les contraintes de l’indivision entre les héritiers

Détenir dans son patrimoine plusieurs biens immobiliers de valeurs différentes peut rendre difficile leur répartition entre ses enfants sans créer d’indivision. La problématique est la même en présence d’un seul immeuble ayant une valeur significative par rapport au reste du patrimoine.

À cette problématique s’ajoute celle relative à la conservation de pouvoirs étendus sur les biens. Transmettre son patrimoine sans dessaisissement total suppose de consentir une donation des biens en nue-propriété. Mais si le droit aux revenus est conservé, la liberté gestion des actifs est abandonnée car le donateur n’est plus le seul propriétaire des immeubles (par exemple une vente supposerait l’accord des usufruitiers et des nus-propriétaires, la détention de droits immobiliers directement par un mineur imposerait l’intervention du juge pour certains actes).

Le recours à une SCI (Société Civile Immobilière) permet de pallier ces différents inconvénients : la détention sociétaire rend possible la transmission son patrimoine sans créer d’indivision, tout en gardant le contrôle et la gestion des actifs, ainsi que les revenus qui y sont attachés.

1.Avantages et inconvénients de la stratégie

1.1.D’un point de vue économique et juridique

Avantages :

  • Éviter les conséquences de l’indivision entre les héritiers (un seul associé ne peut pas provoquer la dissolution de la société)
  • Éviter la dispersion un immeuble dont un seul enfant ne pourrait avoir la propriété
  • Possibilité de procéder à une donation-partage et de lotir tous les présomptifs héritiers
  • Possibilité de transmettre les parts de manière échelonnée en gardant le contrôle de la société
  • Possibilité de combiner transmission à titre gratuit (donation) et à titre onéreux (pour se refinancer)
  • Possibilité de démembrer le bien ou les parts sociales.
  • Grande liberté dans la rédaction des statuts (Libre organisation des pouvoirs pour conserver la maîtrise et la gestion, Aménagement des pouvoirs de l’usufruitier des parts en cas de démembrement, Possibilité d’organiser la répartition des résultats (une répartition inégalitaire n’est pas considérée commune libéralité).
  • Faculté pour le donateur d’assortir la donation de charges et de conditions
  • La valorisation de la société profite à tous les associés.

Inconvénients :

  • Frais de constitution et de fonctionnement
  • Nécessité d’un fonctionnement effectif de la société
  • Responsabilité indéfinie des associés à concurrence de leur quote-part dans le capital social
  • L’apport d’un immeuble à une société civile peut être soumis au droit de préemption urbain
  • Une mésentente persistante entre associés peut bloquer le fonctionnement de la société et nuire aux intérêts de tous.
  • La donation des parts est irrévocable sauf en cas d’inexécution des charges ou ingratitude

1.2.D’un point de vue fiscal

Avantages :

  • Droits de mutation à titre gratuit calculés sur la valeur nette des parts (actif-passif).
  • Décote pratiquée sur la valeur des parts en raison de leur manque de liquidité.
  • Possibilité de procéder à des donations échelonnées et donc de profiter à plein des abattements renouvelés tous les 15 ans

Inconvénients :

  • L’apport à une société civile entraîne l’imposition de la plus-value
  • Obligations déclaratives

2.Principes

2.1.L’utilisation de la société civile pour transmettre à ses enfants

Classiquement 

L’opération consiste à apporter un ou plusieurs immeubles détenus en direct à une société civile immobilière spécialement constituée à cet effet et dont l’apporteur sera nommé gérant avec des pouvoirs plus ou moins étendus.

Cet apport est rémunéré par des parts sociales. 

L’actif sous-jacent appartient désormais à la société. 

Les parts sociales pourront faire l’objet d’une donation aux enfants en toute propriété ou en nue-propriété seulement.

Une fois la transmission faite, Le donateur restera gérant de la structure et gardera ainsi la maîtrise des actifs sociaux. Il en conservera également les revenus si la libéralité a eu lieu avec réserve d’usufruit à son profit. 

Alternatives 

La société peut emprunter pour acquérir l’immeuble (hypothèse de la vente à soi-même). 

L’apport peut également être réalisé avec une inscription de sa valeur en compte courant d’associé en contrepartie. 

L’emprunt ou le compte courant constitue un passif social venant diminuer la valeur des parts à transmettre. Les droits de donation seront donc calculés sur une base beaucoup plus faible.

Les revenus procurés par le bien permettront de rembourser le passif social. La valorisation progressive des parts du fait de ce remboursement sera acquise aux enfants sans supplément de droits de mutation.

Attention : Pour que ce type de stratégie soit pleinement efficace pour économiser les droits de mutation, l’immeuble détenu par la société doit procurer les revenus nécessaires au remboursement de ses dettes. À défaut, le compte courant d’associé (constitué au moment de l’apport ou par le remboursement des mensualités d’emprunt pour le compte de la société) qui ne sera pas remboursé par la société sera soumis aux droits de succession lors du décès de son titulaire.

2.2.À qui proposer cette stratégie ?

Cette stratégie est préconisée pour les personnes soucieuses d’anticiper la transmission de leur patrimoine immobilier.

Elle sera d’autant plus pertinence que le patrimoine à transmettre est composé d’immeubles aux valeurs disparates ou s’il comprend un actif immobilier d’une valeur telle qu’il ne peut pas être transmis à un seul enfant.

La mise en place d’une société civile peut répondre également à des objectifs familiaux bien spécifiques tels que :

  • la protection d’un enfant vulnérable,
  • la protection de son conjoint dans le cadre d’une famille recomposée ,
  • la protection de son concubin.

3.Procédure

3.1.La constitution de la SCI

Forme des statuts : Les statuts peuvent être rédigés par acte sous seing privé ou authentique.

Attention : En cas d’apport d’un immeuble, un acte notarié est obligatoire.  

Contenu des statuts :

Les associés disposent d’une très grande liberté dans la rédaction des statuts, que ce soit au regard des pouvoirs des fondateurs qu’en ce qui concerne les modalités de fonctionnement de la société.  De nombreux points sont à contrôler au regard des objectifs du client et pour éviter d’éventuelles situations de blocages.

Les caractéristiques essentielles de la société :

AssociésLa société doit comprendre au minimum deux associés : personnes physiques et/ou morales, résidents français ou étrangers.

Il est possible d’intégrer les enfants dès la constitution.
DénominationLa dénomination de la société est libre.

Il est conseillé de vérifier si la dénomination n’est pas déja utilisée par une autre société sur la base infogreffe ou celle de l’INPI.
Siège socialEn principe le siège social est fixé au domicile du gérant.

Attention : Il n’est pas possible de le fixer au domicile d’un simple associé car il ne constitue pas un organe de direction.
Objet socialLa rédaction de l’objet social doit être scrupuleuse car c’est ce qui va définir les activités qu’aura vocation à réaliser la société, et donc par truchement les opérations que pourra réaliser la gérance. 

L’objet doit être suffisamment large pour ne pas limiter les actes et opérations susceptibles d’être réalisés en cours de vie sociale, notamment l’acquisition, la détention, la gestion et la cession possible de tous biens ou droits réels portant sur des actifs immobiliers ou financiers.

Il est possible de permettre également :
– la mise à disposition des actifs sociaux aux associés,
– le cautionnement d’un prêt consenti à l’un des associés pour le financement de l’acquisition des parts sociales.

Attention : Si l’objet social est trop restreint, sa réalisation ou son extinction sans aménagement préalable entraînera irrémédiablement la dissolution de la société.
ApportsChaque associé doit réaliser un apport qui peut être :
– un apport en nature (un immeuble, des parts de SCPI)
– un apport en numéraire (des liquidités).
Il reçoit en contrepartie des parts sociales.
Capital socialLe capital social est constitué par les apports réalisés par les associés. Il est divisé en parts sociales réparties entre les associés en fonction de leurs apports respectifs.

Aucun montant minimum n’est imposé.

Toute modification du capital social (augmentation ou réduction) impliquera une décision des associés et la modification des statuts.
 
Il possible de prévoir une clause de variabilité du capital mais un capital variable ne sera utile que si des changements fréquents d’associés sont prévus. 

La gérance :

Nomination du premier gérantLes statuts vont désigner le parent fondateur comme premier gérant.
Rappel  : Le gérant peut être désigné dans les statuts ou dans une assemblée générale concomitante. 
Ne pas oublier de préciser : la durée de son mandat, 
et son acceptation.

Il est possible de désigner immédiatement un co-gérant ou un gérant successif pour que cette personne puisse conserver une autonomie de gestion au sein de la société après décès du premier gérant.
PouvoirsAfin d’assurer des pouvoirs les plus larges possibles au gérant, les statuts peuvent prévoir qu’il pourra sans besoin d’y être autorisé par une décision des associés : procéder à la vente de tout ou partie de l’actif social de la société, acheter et vendre tout immeuble, contracter tout emprunt pour le compte de la société, etc. 

Attention : Si les opérations à réaliser n’entrent pas dans l’objet social, l’accord des associés sera nécessaire pour modifier ce dernier et donner pouvoir au gérant de les réaliser.
 
A contrario, si l’objet social est rédigé de manière extensive, les clauses limitant les pouvoirs de la gérance seront alors inopposables aux tiers.
Autres clauses aménageables– Organisation de la gérance en cas de cogérance,
– Conditions de révocation du gérant (Il est conseillé de prévoir que la révocation de la gérance devra être décidée à l’unanimité des voix, pour permettre au parent qui a gardé une part en pleine propriété de bloquer toute tentative de révocation à son encontre).
– Clause concernant la vacance de la gérance (par exemple en cas d’incapacité ou décès du gérant)
– Conditions de la nomination d’un nouveau gérant.

Les décisions collectives :

Convocation des assembléesEn principe les assemblées sont convoquées par la gérance.

Prévoir :
– les formes et modalités de convocation des assemblées (courrier, email, verbale, etc.),
– le droit pour un associé de convoquer lui-même l’assemblée en cas de carence du gérant ou en cas d’incapacité ou décès de ce dernier.
Mode de consultationPrévoir que la consultation des associés pourra notamment :
– avoir lieu par écrit,
– résulter du consentement de tous les associés exprimé  dans un acte.

Prévoir également les modalités de représentation d’un associé (procuration au profit d’un tiers ou d’un associé).
Décisions collectivesIl est possible de fixer librement les règles de quorum et de majorité, qui peuvent varier selon le type de décision.

À défaut, les décisions des associés devront être prises à l’unanimité.

Contrôle de l’entrée ou du retrait d’un associé :

Clauses d’agrémentIl faut être très précis sur les modalités de l’agrément : les opérations et les personnes visées, l’organe compétent pour se prononcer, la procédure et les délais à respecter, la procédure en cas de refus, un éventuel droit de repentir du cédant, etc.

À noter : Il est possible de confier à la gérance le soin de statuer sur les agréments.
Retrait ou exclusion d’un associéSi rien n’est indiqué dans les statuts, le retrait d’un associé doit être autorisé par l’unanimité des associés.

Les statuts peuvent fixer les conditions d’exercice du droit de retrait en prévoyant par exemple un délai de présence minimal dans la société ou l’impossibilité de se retirer tant que le remboursement des emprunts n’est pas effectué.
Attention : ces conditions ne doivent pas aboutir à priver les associés de la liberté de se retirer.

Il est possible d’aménager également une clause d’exclusion, c’est à dire une clause permettant d’obliger un associé à céder ses parts sociales et à quitter la société. La clause devra préciser les motifs pouvant être retenu ainsi que la procédure à respecter.

Dispositions particulières en prévision d’un démembrement de propriété :

Pour anticiper la transmission future de la nue-propriété des parts sociales, il est recommandé, dès la constitution de la société, d’adapter les statuts au démembrement de propriété :

Sur la répartition du résultatEn principe l’usufruitier a droit aux seuls résultats “courants”.

Il est possible de prévoir statutairement que les dividendes issus d’un résultat exceptionnel, ainsi que les actifs sociaux en cas de dissolution de la société seront attribués à l’usufruitier dans le cadre d’un quasi-usufruit.

Pratiquer un amortissement permet d’optimiser la transmission : l’amortissement permet de réduire le bénéfice courant distribuable aux associés usufruitiers et avantage donc les nu-propriétaires
Sur l’attribution du droit de voteEn principe le droit de vote appartient au nu-propriétaire, sauf pour les décisions relatives à l’affectation du résultat. 

Afin de conserver le pouvoir de décision pendant la durée du démembrement, il pourra être opportun de prévoir que l’ensemble des décisions seront prises par l’usufruitier. 

Attention : Le nu-propriétaire devra conserver a minima, le droit de participer aux décisions collectives

Coût et formalités de constitution :

Rédaction des statutsActe sous seing privé ou notarié. Le coût est variable selon les professionnels

Coût de statuts notariés avec apport d’un immeuble :

– Émoluments du notaire tarifés en fonction de la valeur de l’immeuble apporté. (À noter : Les émoluments du notaire sont libres si aucun immeuble n’est apporté lors de la constitution)

– Émoluments de formalités, débours divers : env. 500 €

– CSI au taux de 0,10 % sur la valeur de l’immeuble apporté.
Enregistrement– Apport pur et simple : gratuit quelle que soit la nature du bien apporté,
– Apport à titre onéreux d’un immeuble : 5 % sur la valeur de l’immeuble apporté,
– Apport à titre onéreux de biens autres que des immeubles : droits de mutation à titre onéreux de droit commun sur la valeur du bien considéré.

Remarque : Il n’est pas nécessaire d’accomplir la formalité de l’enregistrement lorsque les apports sont uniquement des apports en numéraire.
Publicité dans un journal d’annonces légalesEnviron 250 €
Dépôt au CFE (Centre de formalités des entreprises) pour immatriculationCoût 70,39 €. (Tarif en vigueur au 01/01/2019)

3.2.La donation des parts sociales

Forme de la donation

La donation des parts de SCI doit être réalisée par acte notarié à peine de nullité.

Assiette de la donation

La donation pourra avoir lieu en pleine propriété ou avec réserve d’usufruit si le donateur souhaite conserver les éventuels revenus attachés aux immeubles. Cet usufruit pourra être stipulé réversible au profit du conjoint survivant pour les personnes mariées ou au profit de son partenaire pour les personnes pacsées.

Il est impératif de conserver au minimum une part sociale en pleine propriété pour conserver la qualité d’associé après que la transmission ait été faite, ainsi qu’une faculté de blocage pour les décisions devant être prises à l’unanimité (telle que la révocation du gérant par exemple).

En présence d’un couple de donateurs, c’est chacun d’entre eux qui devra conserver une part sociale en pleine propriété pour pallier ces problématiques au décès du premier des époux ou partenaires.

Modalités et aménagements conventionnels

Il pourra s’agir d’une donation simple ou d’une donation-partage.

L’un des attraits de cette stratégie est de pouvoir réaliser une donation-partage alors même que le patrimoine à transmettre ne comprend qu’un immeuble ou des actifs aux valeurs disparates. En effet, la détention sociétaire permet de créer des lots distincts et de procéder à des attributions privatives caractérisant un véritable partage.

Pour mémoire, la donation-partage présente de nombreux avantages au plan civil et au plan fiscal :

– SUR LE PLAN CIVIL :

La donation-partage présente l’avantage de la stabilité : 

  • Les donations partages ne sont pas rapportables à la succession du donateur et ne sont réductibles qu’en cas d’atteinte à la réserve.
  • L’évaluation des biens donnés pour le calcul d’une éventuelle atteinte à la réserve est en principe effectuée au jour de l’acte de donation et non pas au jour du décès.
  • Lorsque les donateurs sont mariés, ces derniers ont la possibilité de recourir à une donation-partage « conjonctive », ce qui permet de répartir les biens du couple entre les enfants dans un seul et même acte. Par dérogation, ce type de donation de peut faire l’objet d’une action en réduction qu’après le second décès. Ceci renforce encore d’avantage la sécurité et la stabilité de l’acte. 

L’acte de donation peut prévoir diverses charges et conditions  :

Notamment :

  • Une réserve d’usufruit afin que le donateur conserve un certain pouvoir sur les parts sociales donnés ou leur prix de cession,
  • La désignation d’un tiers administrateur en présence d’un enfant mineur.

Remarque :

Le mode de détention sociétaire présente à lui seul des avantages certains sur le plan civil. Il permet :

  • de procéder à une ou plusieurs donations partages de titres successives au profit des enfants,
  • de pallier les inconvénients pouvant être rencontrés dans les libéralités graduelles.

– SUR LE PLAN FISCAL :

Droits de succession :

  • Les donations réalisées plus de 15 ans avant le décès ne sont pas prises en compte pour le calcul des droits de succession.
  • Les biens transmis par donation-partage n’entrent pas dans l’assiette du forfait mobilier de 5 %.

Rappel : Si les parts sociales ont été transmises en démembrement, les nus-propriétaires deviendront automatiquement pleinement propriétaires sans aucune imposition supplémentaire

Coût de la donation et des formalités réalisées par le notaire

Émoluments du notaireIls sont calculés sur la valeur en pleine propriété des parts transmises et ce même si la donation a lieu en nue-propriété seulement.
Émoluments de formalités, débours divers Environ 500 €
Enregistrementroits de donation calculés sur la valeur des parts transmises (pleine propriété ou nue-propriété selon), après application de l’abattement de droit commun (et d’un éventuel abattement spécifique selon la nature du bien)
Formalités de publicitéDépôt au greffe du tribunal de commerce d’une copie authentique de l’acte de donation et d’un exemplaire des statuts modifiés 
Coût 15,44 € (Tarif en vigueur au 01/01/2019)

À noter : Le coût des formalités de publicité au RCS est bien moins élevé que celui de celles relatives à la publicité foncière dans le cadre d’une donation d’un immeuble en direct (0,715 % + CSI 0,10 % sur la valeur de l’immeuble transmis

3.3.Situation après réalisation de la donation

Après réalisation de la donation des parts sociales, la société reste gérée par le donateur. Les pouvoirs de ce dernier seront ceux qui auront été librement aménagés dans les statuts.

L’immeuble continuera d’être entièrement géré et contrôlé par le(s) parent(s) gérant(s).

S’il s’agit d’un immeuble locatif et que la transmission des parts a eu lieu en nue-propriété, c’est le donateur en sa qualité d’usufruitier qui percevra les revenus. Il pourra également bénéficier d’un quasi-usufruit sur les revenus exceptionnels (plus-values en cas de vente de l’immeuble social) si les statuts le prévoient.

4.Points pratiques

4.1.Sur la capacité des associés

SCI et enfant mineur

Bien qu’il ne dispose pas de la capacité juridique, un mineur non émancipé peut devenir membre d’une SCI en étant représenté par la personne qui gère ses intérêts : soit ses administrateurs légaux, soit son tuteur. En cas d’apport d’un immeuble appartenant au mineur l’autorisation du juge des tutelles est nécessaire.

Comme les associés d’une SCI sont responsables des dettes de la société sans limitation au prorata de leurs apports respectifs, l’entrée d’un enfant mineur dans une société doit être encadrée

Pour le protéger, on pourra par exemple :

  • aménager les statuts en prévoyant une clause limitant la responsabilité du mineur associé au montant de son apport, le passif excédentaire étant réputé à la charge des autres associés majeurs. 
  • en cas de dette bancaire, obtenir de la banque qu’elle renonce à poursuivre le mineur associé.

Le droit de votre étant un acte d’administration, il peut être exercé librement pour le compte de l’enfant par l’un ou l’autre de ses administrateurs légaux.

SCI et majeur protégé

Les majeurs protégés peuvent devenir membres d’une société civile et en exercer les prérogatives selon les règles de capacité de droit commun.

4.1.Sur la situation matrimoniale des associés lors de la constitution

Époux :

Le pouvoir des époux et le régime des titres acquis dépendent de leur régime matrimonial et de la nature propre ou commune du bien apporté le cas échéant. Attention 

Quel que soit son régime matrimonial, l’époux qui apporte seul un bien qui constitue le logement de la famille doit obtenir le consentement de son conjoint (C. civ. art. 215 al.3).
Pour en savoir plus voir doc expert Régime primaire.

Partenaires pacsés :

Le pouvoir des partenaires pacsés et le régime des titres acquis dépendront du régime des biens qu’ils ont choisi aux termes de leur convention de PACS.

Points d’alerte :

Époux mariés sous le régime de la communauté-La qualité d’associé est reconnue à celui des époux qui fait l’apport.
Lorsque les parts sont acquises au moyen de fonds communs, le conjoint peut revendiquer la qualité d’associé pour la moitié des parts (C. civ. art. 1832-2). 

– Lorsque les parts sont acquises par les époux ensemble, ils ont tous les deux la qualité d’associé. 

– Si l’apport est fait au moyen de fonds propres, il convient de faire une déclaration d’emploi ou de remploi dans les statuts (C. civ. art. 1434).
Partenaires pacsés– Soumis au régime légal de la séparation de bien (pacs conclu à compter du 1er janvier 2007) : si l’un des partenaires fait un apport  à une société, l’autre ne peut pas revendiquer la qualité d’associé.

– Soumis au régime de l’indivision : les parts sociales sont réputées indivises entre les partenaires, sauf s’il est stipulé dans les statuts que l’apport est fait au seul profit du partenaire apporteur.

Par précaution, on pourra faire intervenir le partenaire pacsé à l’acte pour confirmer cette propriété exclusive.

4.3.Sur l’apport d’un immeuble par un associé

Conséquences fiscales 

Imposition de la plus-value immobilière chez l’associé apporteur :

L’apport (ou la vente) de l’immeuble à la société constitue une mutation à titre onéreux entraînant l’imposition de la plus-value constatée dans les conditions de droit commun.

Point d’alerte : engagements en cours

Si l’immeuble apporté a fait l’objet d’un engagement de conservation ou de location souscrit dans le cadre d’un dispositif fiscal (Pinel, Scellier, Borloo, monument historique…), l’apport à société constituera une rupture de cet engagement et entrainera la remise en cause intégrale des avantages fiscaux qui avaient été accordés. 

Droit de préemption

Sauf cas particuliers et selon le lieu de situation de l’immeuble, l’apport de l’immeuble est susceptible donner ouverture :

  • au droit de préemption urbain,
  • au droit de préemption de la SAFER,
  • à un droit de préférence conventionnel.

4.4.Sur le fonctionnement de la SCI

La société civile doit avoir une existence réelle, sous peine d’être considérée comme une société fictive. Cette existence suppose le respect de certaines règles. 

La tenue de l’assemblée générale ordinaire annuelle dans les conditions prévues par la loi et les statuts est une condition sine qua non de l’existence de la société civile.

On rappellera par ailleurs que la participation aux assemblées est un droit de tout associé (nu-propriétaire compris) et que cette règle est d’ordre public (Article 1844 du Code civil). La possibilité de se faire représenter doit être permise dans les statuts, le mandataire ne pouvant être qu’un autre associé sauf clause contraire.

L’ouverture d’un compte bancaire

Il est nécessaire d’ouvrir un compte bancaire au nom de la société car c’est elle qui en principe doit encaisser les loyers et payer les charges.

Si des travaux doivent être engagés en urgence ou si la société n’a pas assez de trésorerie pour faire face à ses charges, les associés peuvent opérer un versement de fonds sur le compte de la SCI qui ensuite réglera ses charges. Cette avance en compte courant est réalisée par les associés les plus diligents

Les obligations comptables 

S’il n’y a pas d’obligation de tenir une comptabilité commerciale (sauf stipulation contraire des statuts), il est nécessaire de tenir au moins une comptabilité de trésorerie (dépenses/recettes).

Quoi qu’il en soit,  le gérant doit rendre compte de sa gestion une fois par an : un bilan annuel doit être effectué et les comptes doivent être approuvés annuellement en assemblée générale.

La tenue d’une comptabilité est importante pour pouvoir justifier à tout moment des droits d’un associé dans la société ainsi que des créances et dettes de chacun envers la société (compte courant).

La comptabilité reste le plus sûr reflet de la réalité sociale et le meilleur moyen de répondre aux éventuelles interrogations de l’Administration fiscale. Elle fait partie de la vie sociale, et à ce titre semble nécessaire à l’existence réelle de la société civile.

4.5.Sur la fiscalité dans le cadre d’une SCI

L’imposition des revenus 

En principe, une SCI relève du régime des sociétés de personnes et est soumise à l’impôt sur le revenu (IR) : les associés sont imposés personnellement sur les résultats à hauteur de la proportion qu’ils détiennent dans le capital social, que le résultat soit distribué ou non. 

En présence d’une activité de location immobilière, les revenus dégagés sont imposés à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus fonciers et soumis aux prélèvements sociaux au taux global de 17,2 %. 

Attention : Les associés qui ne louent pas un immeuble nu par ailleurs ne peuvent pas bénéficier du micro-foncier.

Les associés peuvent opter à l’impôt sur les sociétés (IS), soit lors de la constitution de la société soit en cours de vie sociale.

Dans cette hypothèse, le résultat de la société est imposé au taux réduit de 15 % jusqu’à 38 120 € et au taux de 28 % jusqu’à 500 000 €, que le résultat soit distribué ou non.
En cas de distribution, les dividendes sont soumis au prélèvement forfaitaire unique au taux de 12,8 % sans abattement ou, sur option globale du contribuable, au barème progressif après abattement de 40 %, ainsi qu’aux prélèvements sociaux au taux global de 17,2 %.

Ce choix, qui peut s’avérer opportun si la société détient un immeuble locatif, doit être fait en considération de plusieurs paramètres tels que l’importance des loyers et des charges, l’affectation des résultats, ou encore le taux marginal d’imposition des associés.

Révocation de l’option de l’option à l’IS

Pour les exercices clos à compter du 31 décembre 2018, l’option à l’IS peut être révoquée pendant 5 ans

  • si l’option est révoquée dans les 5 ans : la renonciation entraîne les mêmes conséquences qu’une cessation d’activité et il n’est pas possible d’opter à nouveau pour l’IS,
  • si l’option n’est pas révoquée dans les 5 ans : l’option devient irrévocable. 

Imposition des plus-values :

OpérationDans le cas d’une SCI à L’IRDans le cas d’une SCI à L’IS
Vente de l’immeuble par la société= Régime des plus-values immobilières des particuliers.

Assiette :
PV = prix de cession – prix de revient
Abattement pour durée de détention (date d’acquisition du bien par la société)

Taux d’imposition :
19 % + prélèvements sociaux au taux global de 17,2 %.

À noter :
Le prix de revient est calculé au niveau de la société. Il s’agit de la valeur de l’apport ou de l’acquisition par la société.
= Régime de l’IS (la plus-value est intégrée au résultat de la société).

Assiette : 
PV = prix de cession – valeur nette comptable 

Rappel :
La valeur nette comptable est égale à la valeur de l’immeuble au bilan, diminuée faite des amortissements.
Taux d’imposition :
Résultat courant (IS)
Vente des parts sociales par les associés= Régime des plus-values immobilières des particuliers.

Assiette :
Prix de cession – prix de revient
Abattement pour durée de détention (date de souscription ou d’acquisition des parts par l’associé)

Taux d’imposition :
19 % + prélèvements sociaux au taux global de 17,2 %.

À noter : Le prix de revient des parts est calculé au niveau l’associé. S’il s’agit d’un associé fondateur, on retiendra la valeur de l’apport qu’il a réalisé lors de la constitution de la société.
= Régime des plus-values mobilières des particuliers. 

Assiette :
Prix de cession – prix de souscription ou d’acquisition des parts

Taux d’imposition :
PFU au taux de 12,8 % ou barème progressif si option globale + prélèvements sociaux au taux global de 17,2 %

Remarque : Pas d’abattement pour durée de détention pour des titres acquis à compter du 1er janvier 2018 en cas d’option globale pour une imposition au barème progressif.

Situation au regard de l’IFI

Les parts sociales sont imposables à concurrence de leur valeur vénale pour la fraction représentative des biens et droits réels immobiliers détenus par la société.  Cette fraction est obtenue en faisant le ratio entre les actifs immobiliers et le montant brut des actifs sociaux.

Attention : Certaines dettes contractées par la société ne doivent pas être prises en compte dans l’évaluation des titres détenus par  le redevable. 

Le traitement des dettes détenues par une société semble plus favorable que le traitement des dettes contractées directement par le contribuable.

4.6.Sur les comptes courants d’associés

Principes

Le compte courant d’associé est une créance de l’associé envers la société
 

Il apparaît :

  • Lors de la création de la société pour assurer le financement de l’acquisition à réaliser par la société ou en cours de vie sociale. 
    Son montant correspond alors aux avances faites par l’associé à la société.

    Exemples :

    • apport de liquidités pour financer l’investissement réalisé par la société

    • paiement des mensualités d’emprunt au lieu et place de la société.
  • Par la mise en distribution d’un résultat en présence d’une trésorerie insuffisante
    Son montant correspond alors à la différence entre la quote-part de résultat revenant à l’associé et la trésorerie réellement appréhendée par lui

Le compte courant constitue un passif social qui sera pris en compte pour déterminer la valeur des parts sociales pour le calcul des droits de donation.

Attention  : Pour déterminer la fraction de la valeur des parts sociales soumise à l’IFI, il n’est pas tenu compte des comptes courants détenus par le contribuable dans la société et ayant servi à financer un immeuble ou des droits immobiliers.

Rémunération du compte courant

Les associés peuvent décider de rémunérer ou non les comptes courants. Les intérêts versés par la société seront déductibles de son résultat si la société peut justifier de l’affectation des sommes apportées en compte courant et de leur utilisation en vue de générer des revenus fonciers (société soumise à l’IR).

L’associé percevant une rémunération pour son compte courant sera imposable dans les conditions de droit commun.


Remboursement

Sauf convention contraire, l’associé qui a avancé des fonds à la société peut en demander le remboursement à tout moment, à condition que cette demande ne soit pas abusive.

Il est conseillé de conclure une convention écrite afin d’encadrer les modalités de remboursement de chaque compte courant d’associé (délai de préavis pour demander un remboursement, limitation de montant, possibilités de refus par la société, etc.). 

Sort du compte courant en cas de transmission des parts 

La transmission des parts, à titre gratuit ou à titre onéreux, n’emporte pas par défaut la transmission du compte courant. Celle-ci nécessite une disposition expresse.

5.Les limites de la société civile

5.1.Sur la responsabilité des associés et du gérant

La responsabilité des associés

Les associés sont indéfiniment responsables des dettes de la société à proportion de leur quote-part dans le capital social.  Par conséquent, ils peuvent être poursuivis sur leurs biens personnels.

Rappel  : La responsabilité des associés mineurs peut être aménagée statutairement.

À noter  : Le créancier de la société civile qui est également associé de cette dernière se voit limité à une action contre la société. Si cette dernière s’avère vaine, ce créancier ne dispose pas de droit de la possibilité d’exiger le remboursement auprès des associés.

La responsabilité du gérant

Le gérant est responsable individuellement envers la société et envers les tiers :

  • soit des infractions aux lois et règlements, 
  • soit de la violation des statuts, 
  • soit des fautes commises dans sa gestion.

La responsabilité civile, pénale et fiscale du gérant peut être donc être mise en cause à l’occasion de l’exercice de ses fonctions.

5.2.Sur la détention de sa résidence principale dans une SCI

La détention de sa résidence principale au travers d’une SCI fait perdre au contribuable certains droits ou avantages fiscaux :

  • Le bénéfice de l’abattement de 30 % n’est pas applicable sur la valeur des parts sociales pour le calcul de l’IFI. 
  • L’abattement potentiel de 20 % en principe applicable à la valeur de cette résidence principale pour le calcul des droits de succession est perdu. 
  • Le conjoint survivant ne pourra pas revendiquer ses droits sur le logement familial. Pour mémoire ces droits lui permettent de conserver gratuitement la jouissance du logement pendant un an, puis, sous conditions, d’y résider jusqu’à son décès.
  • Si le contribuable dispose d’une épargne salariale (PEE ou PERCO), il ne pourra pas débloquer ces capitaux par anticipation pour acquérir, construire ou agrandir sa résidence principale si celle-ci est détenue par une société. Cet avantage est réservé aux personnes détenant leur résidence principale en direct.
  • L’entrepreneur individuel ne peut pas bénéficier de l’insaisissabilité sur les parts sociales qu’il détient dans une SCI, même si celle-ci détient sa résidence principale. 

Un seul avantage est conservé en présence d’une société civile : la plus-value générée par la vente de la résidence principale reste exonérée.
 

5.3.Sur certaines conséquences juridiques et fiscales d’une détention sociétaire

La détention sociétaire d’un immeuble emporte les conséquences suivantes :

  • Perte des mesures protectrices des consommateurs, notamment : 

    • délai de réflexion de 10 jours (loi Scrivener),
    • mention du taux effectif global (TEG), 
    • interdiction de versement préalable à l’acceptation, 
    • maintien de l’offre pendant 30 jours, 
    • suspension judiciaire du prêt en cas de difficulté d’exécution de l’acte d’acquisition ou du contrat de VEFA (vente sur plan), 
    • résiliation de l’assurance emprunteur (résiliation durant la première année et résiliation annuelle).
  • Perte des mesures protectrices des personnes non-professionnelles en cas d’acquisition immobilière, notamment :

    • délai de rétractation, 
    • garantie des vices cachés.
  • Perte de l’exonération de la première cession d’un logement autre que la résidence principale par un non résident.
  • L’entrepreneur individuel ne peut pas bénéficier de l’insaisissabilité sur les parts sociales qu’il détient dans une SCI, même si celles-ci sont affectées à son activité professionnelle. 
  • Des modalités particulières en matière de baux d’habitation :

    • Durée minimale de 6 ans si la SCI n’est une pas société familiale,
    • En cas de reprise pour habiter (uniquement si la société est familiale et limitée au profit des associés et non pas des proches)
    • Pas de congé possible si le locataire est âgé.

5.4.Sur l’exercice d’une activité de location meublée dans une SCI

Il est tout à fait possible de réaliser une activité de location meublée dans une société civile puisqu’une telle activité est considérée comme civile juridiquement. 

Toutefois, fiscalement, le recours à une société civile n’est pas approprié pour l’exercice d’une activité de location meublée car une société civile qui réalise des opérations relevant des BIC est soumise d’office à l’impôt sur les sociétés, avec toutes les conséquences fiscales que cela emporte :

  • en cas de cession de l’immeuble, la plus-value réalisée est soumise à l’IS et non plus au régime des plus-values immobilières des particuliers, se privant ainsi de potentielles exonérations et des abattements pour durée de détention ;
  • les distributions sont doublement imposées : à l’IS lors de la taxation du résultat et au titre des revenus de capitaux mobiliers lors des distributions de dividendes chez les associés.

6.Devoir de conseil – Information sur les risques de l’opération

6.1.Information sur la constitution de la société

  • Caractéristiques de la société à constituer,
  • Conditions à respecter,
  • Points d’alerte sur la réalisation des apports,
  • Aménagements statutaires envisageables,
  • Formalités constitutives,
  • Coût. 

6.2.Information sur la gestion de la société

  • Fonctionnement de la société, 
  • Financement, 
  • Gérance,
  • Gestion des comptes courants,
  • Politique distributive, 
  • Autres modalités de retrait des liquidités,
  • Obligations comptables,
  • Obligations déclaratives.

6.3.Information sur la fiscalité au sein de la société

  • Régime des sociétés de personnes,
  • Option IS, 
  • Règles de détermination du résultat imposable, 
  • Déductibilité de la rémunération des comptes courants, 
  • Imposition des plus-values,
  • Sort des déficits. 

6.4.Information sur la fiscalité chez les associés

  • Fiscalité des revenus appréhendés par les associés,
  • Rémunération des comptes courants, 
  • Régime fiscal des plus-values sur cession de parts,
  • IFI,
  • Transmission des parts sociales,
  • Transmission du compte courant.

6.5.Information sur les inconvénients d’une détention sociétaire

  • Limites relatives à la détention de certains immeubles,
  • Perte des mesures protectrices des consommateurs,
  • Perte des mesures protectrices des non professionnels,
  • Autres conséquences juridiques et fiscales.

6.6.Information sur les risques économiques

  • Absence de garantie en capital,
  • Défaut de liquidité
  • Responsabilité des associés sur le passif social,
  • Responsabilité du gérant.